2020 a tourmenté le monde entier, mais le cœur hip-hop français ne s’est jamais arrêté de battre. Confinés et privés de voir leurs publics, les artistes étaient tout de même présents et, pour la plupart, travaillaient sans relâche. Les multiples sorties du vendredi étaient toujours au rendez-vous de minuit. Les albums ont fait face à de nombreux projets plus courts, mixtapes ou EP. La promotion a pris une autre envergure, dans un rapport bien plus proche et intime avec le public à travers les lives Instagram et autres. Des gros projets et aboutissements pour certain n’ont pas flanché face à la pandémie. Et l’équipe du 16 a continué à vous offrir des articles écrit avec toujours plus de passion, notamment la série Back in the 2010’s. Il est maintenant temps de faire un nouveau retour, cette fois sur l’année passée, pour se lancer dans la nouvelle avec toutes les clés et les leçons.
Le 10 janvier, c’est avec un cœur blanc et une colombe que le paysage urbain rendait hommage à l’album posthume de Népal, décédé deux mois auparavant. Si beaucoup le voyait comme un artiste underground, sa disparition lui a offert l’estime, la visibilité et l’amour que le monde urbain lui devait. Tout dans le respect artistique de ce dernier, son entourage a réalisé jusqu’au bout ses choix et ses prévisions comme le montre le clip imagé de Nekfeu dans une autre alternative de vie dans Sundance.
Le 17 janvier, Maes délivre son deuxième projet intitulé « Les Derniers Salopards ». Impossible d’avoir pu passer à côté, cet album est resté dans les meilleures places du top SNEP pendant de longues semaines, et y est toujours présent un an après sa sortie. « Les derniers seront les premiers » disait la sainte phrase, reprise par son acolyte Booba ou encore Dany Dan sur une compil’ du 45 Scientific, « Sang d’encre – Haut débit ». La recette suivie par Maes pour cet album est celle de la réussite. Un peu de rap tranchant, des mélodies efficaces et surtout des hits dans l’air du temps. Difficile de dire si l’on retiendra cet album sur la longueur, ni même si Maes restera dans les premiers encore longtemps, alors même que certains ont réussi à briller avec comme ambition : « mettre fin à la zumba ».
Du 10 au 14 février, Meryl était à la tête de planète rap pour faire le promotion de son nouveau projet « Jour avant caviar ». Un album d’une qualité excellente, qui annonce la future et redoutable figure principale des Antilles françaises. Si sa notoriété est déjà grandissante, elle ne tourne pas le dos à ses origines, bien au contraire. Meryl a profité de sa semaine chez Skyrock pour donner une tribune a la scène antillaise, de Martinique à la Guadeloupe en passant par la Guyane. Tous les artistes invités ont pu démontrer l’étendue de leur talent. Des freestyles Planète Rap désormais historiques ont mis le feu aux poudres. Le rap antillais se souviendra de la soirée du mardi 11 février : autour de la table, Jozii, Marginal, Tiitof et Evil P accompagnent Meryl. Lyrrix s’est baladé sur une production type drill. Mata a tout donné avec son hit Business rentable. Bref, les auditeurs encore ignorants de la scène rap/trap/dancehall ont passé une semaine, tous frais payés par Meryl et Fred, à la découverte de cette scène en super développement.
Le 28 février, alors que personne ne s’attendait à quoi que ce soit, Laylow envoie l’album de l’année (selon vos votes aux 16 Mesures d’Or 2020) : Trinity. Si l’univers de l’artiste toulousain n’a jamais été un coup de cœur unanime pour le monde urbain et nous les premiers, c’est avec un album parfait, surprenant, entrainant et giflant qu’il a littéralement étincelé la musique francophone. Trinity offre une musicalité extraordinaire et offre un billet d’entrée à Laylow dans les artistes dites de « game-changer ».
Du 17 mars au 11 mai, le mot « confinement » a résonné partout et sa réalité s’est fait connaitre. Pendant cette période, les lives des artistes, mais aussi des chroniqueurs et des médias, se sont démultipliés. Et les auditeurs n’ont, finalement, jamais autant entendu parler de musique que pendant cette période malgré des sorties creuses. Mais un rendez-vous quotidien nous a plus marqué que les autres, il est signé Mehdi Maïzi, et prenait le nom « Confine Mouse ». Mehdi recevait chaque jour des artistes, qu’ils soient dans la lumière ou encore dans l’ombre, mais aussi des personnes importantes du milieu. Un bref retour à l’époque – pas si lointaine d’ailleurs – de La Sauce, avant son retour dans Le Code. Ces lives montrent une facette plus instantanée et directe des artistes. Enfin, que serait le Confine Mouse sans les parties de Roland Gamos et les chroniques non moins géniales que provocantes de Yerim Sar ? La question est vite répondue.
Le 15 août, la France découvre le titre qui va rythmer pour certains, et hanter pour d’autres, le reste de l’été et de l’année 2020 : Bande Organisée. Le premier titre de 13’Organisé, collectif et compilation 100% Marseillaise initiée par Jul et dirigée par lui-même et son frère Romain. Réunir tout Marseille et dépasser les générations est une extraordinaire initiative que seul le J aurait pu réaliser aussi généreusement. Cette compilation sans précédent depuis des années a fait l’effet d’une bombe, et le hit principal a battu tous les records, grâce notamment aux phrases devenues classiques : « le J c’est le S », « Oui, ma gâtée », « C’est pas la capitale, c’est Marseille bébé » ou encore le « zumba cafew » de Soso. Cependant, le projet n’a pas satisfait un très grand nombre musicalement, le trop grand différentiel de niveau entre les artistes est une des causes. On retient les très bons titres « L’Etoile sur le maillot » et « Je suis Marseille ».
Le 11 septembre, Freeze Corleone est au centre du rap jeu à la sortie de « La Menace Fantôme ». Ses premières formes apparaissent dès le titre introductif, Freeze Raël. La force de frappe de ce titre est directement reconnue par tous. Le voile de la menace est levé, et chaque musique résonne en celui qui l’écoute. Quand la menace est devant soi, et qu’elle prend de l’ampleur, les contradicteurs s’affolent. Entre la LICRA, les politiques et les piètres plateformes de streaming, les controverses à propos de Freeze ont propagé d’autant plus sa musique et son album. A retenir le soutien massif de l’ensemble des acteurs du rap français, et l’incroyable présence du seul Toto Riina de ce rap jeu.
Le 18 septembre, après des années de teasing, Damso libère QALF. En 2020, aucun album ne peut égaler QALF dans la controverse. Si artistiquement c’est une très bonne surprise et un contre-pied réussi, le projet reste pendant un certain temps une longue période de spéculation et de frustration pour une grande partie du public de l’artiste qui se retrouve avec un très bon album mais dont le dernier était à l’opposé de leurs attentes. La conclusion, c’est qu’il apporte une bouffée d’air artistique au milieu urbain.
Le 27 novembre, Chanceko reprend son titre Elvis dans une très belle version symphonique. En parlant de couleur, son EP « Gaura » est un camaïeu de notes ensoleillées. Cette version du morceau est d’autant plus illuminée. Pianiste, batteur, guitariste et violoniste sont réunis, et deux choristes accompagnent Malaboy dans sa ballade. A consommer sans modération. Chanceko est pour nous une véritable révélation de l’année et un artiste sur qui miser.
Le 21 décembre, Grünt lance son nouveau format intitulé « Opus », en collaboration avec Adidas. Pour la première, Dinos et plus particulièrement son nouvel album « Stamina, » sont à l’honneur. Jean Morel veut pour son émission se concentrer sur l’œuvre et le processus de sa création. Nos-di n’est pas seul donc, les producteurs Ken & Ryu et Heisenberg, l’artiste paniste Sofiane Pamart, et le célèbre photographe Fifou sont au rendez-vous. Le format d’Opus est très intéressant, et faire de cet album son sujet pour la première de l’émission est très judicieux ! Lüv sur Grunt.
Sur ce, nous ne pouvons que vous souhaiter une année 2021 heureuse, riche et de réussite pour vos projets.
Cher lecteurs du 16, nous espérons vous retrouvez au rendez-vous pour de nouveaux articles et qui sait, dans de nouveaux formats.
Continuez à partager si le cœur vous en dit, sans vous la qualité ne peut être reconnue.