Le rap français à la particularité de contenir des millions de références à des univers très différents. Que cela soit des phénomènes d’actualité, des mangas, des sports, le cinéma ou d’autres domaines, l’étendue du rap, n’a aucune limite. Dans cette nouvelle chronique, 16 Mesures revient sur la relation entre la littérature française et le rap français, et plus précisément chez Baudelaire.
JAMAIS TROP TARD POUR OUVRIR UN LIVRE
Comme dirait SCH dans Anarchie, il est « jamais trop tard pour ouvrir un livre », d’autant plus que ce dernier est véritablement vu comme un symbole de sagesse dans le rap français. Lire, c’est s’instruire, mais c’est également comprendre parfois mieux le monde qui nous entoure. L’un de ceux qui cite le plus la littérature, c’est Nekfeu. Dans Rêves d’avoir des rêves, il rappelle que la lecture nous instruit et nous enrichit mais la réalité le rattrape : « Et j’en ai lu des livres, j’en avais des idées pourtant mais voter, c’est décider de qui va décider pour toi ». Par ailleurs, dans le morceau très engagé de La Marche réunissant plusieurs grands artistes, Akhenaton critique les philosophes qui développent leurs mauvaises pensées à travers les livres.
Certains artistes se servent de la valeur d’un livre pour imager ou appuyer des faits afin qu’ils y restent gravés comme chez Youssoupha dans L’enfer c’est les autres sur les différences raciales. Tandis que d’autres comme AshKidd dans Lolita ou Dadju dans Seconde chance : « Si l’histoire ne te plait pas, on va changer de livre », utilisent le livre comme un recueil de sentiments ou une exposition de ces derniers.
Bien que le livre est synonyme d’apprentissage et de symbole, cela n’en fait pas moins une valeur humaine pour être une bonne personne. Dans le morceau, La Pluie d’Orelsan, l’artiste explique qu’il a « des potes diplômés et d’autres qu’ont pas lu deux livres » mais ce n’est pas pour autant qu’il ne leur ferait pas confiance.
UN BOUQUET DE RÉFÉRENCES À BAUDELAIRE
Auteur du XIXe siècle, Charles Baudelaire est l’un des auteurs références du rap français. Le poète français parisien s’est vu cité par Booba, Orelsan ou encore chez Bigflo & Oli en tant que référence de l’éducation nationale souvent étudiée lors des cours de français. Cependant, d’autres artistes le citent et le dénigrent comme chez Sadek au profit de l’écriture urbaine ou d’autres comme Médine le respectent dans Trône : « J’ai rien d’un Baudelaire, ni d’un Sting, je suis qu’un pilote de ligne qu’on a pris pour un pirate de l’air ».
« J’vais faire un tour au cimetière, j’t’offre les mêmes fleurs que Baudelaire chérie » – Louis XIV, Ateyaba
L’œuvre la plus célèbre de Baudelaire c’est les Fleurs du mal, cette dernière est un recueil de poème regroupant presque l’ensemble de la poésie de l’auteur parisien. Par ailleurs, l’œuvre créa scandale à sa sortie auprès de la société, qui juge certains vers immoraux. Les Fleurs du mal réunit à la fois des vers sur la souffrance, le dégoût du mal, l’idéalisation d’un monde et l’angoisse de la mort.
C’est alors en tout logique que l’on retrouve des références à l’un des ouvrages les plus célèbres de la littérature française. La plus belle est celle de Dinos : Les pleurs du mal, qui vient décrire la tristesse dans les quartiers et dans les comportement sociaux. Par ailleurs, ce dernier a également dévoilé le morceau Les fleurs du mâle, sur le désespoir et la solitude de l’homme face à la vie et l’amour. Un autre poète urbain, Georgio, le cite également dans Rose noire : « Les fleurs du mal ne poussent pas qu’dans les poèmes de Baudelaire ».
« L’être humain m’exaspère, c’est la vie qui t’a fait tomber mais, frelon, c’est toi qui reste à terre. Je n’vois que des âmes austères puisque le mal a tant fleuri, j’ai le même jardin que Charles Baudelaire » – DKZ, Django
Par ailleurs, le rap français a tendance à citer les Fleurs du mal en référence à des drogues à inhaler comme chez Hayce Lemsi, Columbine ou encore chez Senamo dans Rose & Bleu. Quant à lui, Deen Burbigo compare les femmes aux fleurs du mal dans un morceau éponyme.
Par ailleurs, une autre référence à Baudelaire est présente dans les textes du rap français : le spleen baudelairien. Ce dernier correspond à une profonde mélancolie née du mal de vivre. Cette mélancolie est présente dans un grand nombre de vers des Fleurs du mal. Le spleen du rap français vient également démontrer le mal-être de certains artistes : Jazzy Bazz dans 64 Mesures de Spleen, Django dans Fichu ou encore Dinos dans Spleen.
« Le spleen de Baudelaire passe comme une irritation passagère » – Château de cartes, Lorage
Bien entendu, il existe encore des dizaines et des dizaines de références à des auteurs français voir internationaux, on a préféré se centraliser sur Baudelaire. Seulement, rien n’interdit de voir une suite à cette chronique avec de nouveaux auteurs… En attendant, voici une liste de morceaux qu’on trouve hyper bien écrits :
- RÊVES D’AVOIR DES RÊVES – Nekfeu
- LES PLEURS DU MAL – Dinos
- L’ENFANT SEUL – Oxmo Puccino
- NOTES POUR TROP TARD – Orelsan
- LETTRE A LA REPUBLIQUE – Kery James
- LE CODE – SCH
- MA DEFINITION – Booba
- L’OR DE LA VAPEUR ROUGE – Georgio
- ESPERENCE DE VIE – Youssoupha