Trois ans après son dernier projet Le Monde ne suffit pas, S.Pri Noir débarque avec son premier album qui s’intitule Masque Blanc, un album riche de 22 titres dont 5 featurings. Trois années d’absence de projets personnels, ce qui n’a pas empêché S.Pri Noir d’être très présent sur la scène du rap.
Connaitre S.Pri Noir
Voilà maintenant quelques années que S.Pri Noir est devenu un des visages incontournables du rap français. Le rappeur du 20e a un pseudo en référence à sa couleur de peau et son côté réfléchi.
S.Pri Noir se démarque des autres rappeurs de sa génération par sa fine plume et par sa manière de poser sur les instrus. Ce mélange apporte un rap cuisiné à la vapeur américaine, qui est une grande source d’inspiration du rappeur sénégalais.
Avant la sortie de Masque Blanc, S.Pri Noir avait dévoilé deux projets, Licence to Kill en 2014 et Le Monde ne suffit pas en 2015 sur lequel on retrouve notamment le titre La Nuit avec May Hi. Entre temps, l’artiste a souvent été invité sur de nombreux projets, ceux de Nekfeu avec les célèbres Ma Dope ou Saturne, sur Demande-moi avec Still Fresh, ou encore sur chacun des volets de la trilogie des DBSS de Sneazzy avec Okkk, Evite-là et Everyday) sans compter sa présence sur les récents projets de Lefa, Dadju ou encore Black M. Tout en partageant la scène de la tournée S&S Tour avec Sneazzy, l’ancien double champion de France de football américain est aussi devenu l’égérie de la marque Adidas.
Analyse Masque Blanc
Trois années après son projet Le Monde ne suffit pas, S.Pri Noir débarque avec Masque Blanc, un titre en référence à l’œuvre littéraire de Frantz Fanon : Peau noire, masques blancs. Ce livre parle de l’identité noire, sujet que l’on retrouve en version plus élargit dans l’album : l’identité des hommes et leur faculté à pouvoir changer de masque identitaire en fonction du lieu où ils se trouvent ou des personnes avec qui ils sont.
Comme dans ses précédents projets, S.Pri Noir nous démontre une fois de plus sa qualité de kickeur dans plusieurs morceaux. Tout d’abord dans Nymeria, qui est à la fois une référence au loup géant d’Arya Stark dans Game of Thrones, où l’artiste a révélé au micro d’OKLM que ce morceau avait connu 30 versions différentes. Highlander est en référence au film du même titre avec Christophe Lambert et Sean Connery et signifie « guerrier immortel », mais ce son est aussi un clin d’œil musical au morceau Celte. On retrouve aussi cet esprit kickeur dans Middle Finger, Michael Jackson, Podium, Skywalker ou encore Jiujitsu.
A l’opposé des morceaux contenant une démonstration de kickage, certains morceaux vont venir bouleverser et apaisé ce côté obscur du fils de Maitre Windu, le morceau Papillon en est la preuve. Effectivement, dans ce titre qui exprime une volonté de s’échapper du quotidien parisien, S.Pri Noir rappe ses couplets et chante le refrain. Cette volonté de chanter ses refrains montre la diversité musicale de l’artiste, une diversité qu’on retrouve par ailleurs dans Follow Me. Des morceaux comme Narco Poète ou encore Fusée Ariane sont des morceaux plus calmes et très planants où les refrains restent en tête et donnent envie d’être écoutés en boucle.
Par ailleurs, cet album complet musicalement est aussi accompagné de plusieurs invités d’univers musicaux variés. Tout d’abord, sur le titre Finesse, on y découvre la présence du groupe Haute. Si on devait imager ce morceau, on mettrait S.Pri Noir dans la peau d’un joueur de football, et plus précisément d’un attaquant, qui à travers ses kicks : va dribbler efficacement pour arriver face au gardien, et grâce à la mélodie : va tirer en louche au-dessus du gardien, qui représente les codes du rap, pour réaliser un morceau extraordinaire et marquer un but d’anthologie.
Comme autres guest sur ce projet, on retrouve Nekfeu sur Juste pour voir, un morceau symbolique pour les deux rappeurs où ils expliquent qu’à la base ils voulaient juste performer, et que malgré leurs vies différentes, le destin et la musique ont fait qu’ils sont allés plus loin que ce qu’ils imaginaient. Mon Crew est accompagné de Nemir qui chante en arabe, une nouveauté pour le rappeur perpignanais, ce qui amène une vibe raï et un morceau dance-hall, dans un mood similaire à celui de Chico, bien que celui-ci soit plus dans une vibe latine.
Alors qu’on s’attendait à la présence de Still Fresh sur le projet, la présence de Viviane Chidid était quant à elle surprenante. La grande chanteuse sénégalaise, qui est aussi la belle-sœur de Youss N’Dour, pose sa voix sur Seck. Seck est un nom de famille très répandu au Sénégal. Ce morceau personnel, aux sonorités africaines, raconte l’histoire de sa mère lorsqu’elle a décidé de quitter le Sénégal pour vivre en France. Un morceau poignant lorsqu’on sait qu’il a fini de l’écrire après son décès. 16 Mesures ne mâche pas ses mots et qualifie ce morceau de chef d’œuvre.
Les femmes semblent être un sujet principal pour le rappeur sénégalais. En effet, entre Baby Gyal, où il parle d’une femme au mental de bandit la journée et de princesse la nuit, ou encore Elle a et Love, les femmes sont au rendez-vous. Le morceau Belle et la bête traite lui aussi des femmes, mais sous story-telling. C’est une jonction entre deux personnes de son entourage : une petite de son quartier qui voulait grandir trop vite et une ancienne amie à lui qui est devenue escorte.
Pour conclure, l’album Masque Blanc est un album aux sonorités musicales hétérogènes dû à ses différentes influences, S.Pri est capable à la fois de kicker mais aussi de faire ses propres refrains. Un album pour tous les goûts et pour tous les moods, on peut très bien se casser la nuque sur des morceaux qui bougent et à la fois se mettre à penser sur des morceaux plus calmes. Une véritable réussite pour le rappeur sénégalais.