Bruce Wayne n’est le seul à vivre une double vie. Omar, ou OMR, a une vie plus ou moins scindée : d’un côté, celle d’un lycéen en terminale passant le BAC, de l’autre, celle d’un jeune rookie prometteur qui dévoile son premier projet, une Feat-tape (projet composé uniquement de featurings, ndlr), dans laquelle on retrouve notamment Fianso, L’Algérino, Sam’s…
Comment vit-on le fait d’avoir l’école d’un côté et le début d’une vie d’artiste de l’autre ?
C’est des sacrifices. J’essaye de savoir faire la part des choses. Quand on est dans ma situation, on est vite plongé dans la vie d’adulte, ce qui peut paraître difficile, mais j’ai la chance d’être bien entouré. Quand je parle de sacrifices, je parle de séances studio après les cours. Parfois même l’inverse, je me retrouve en studio jusqu’à 7h du matin, et à 8h je vais directement en cours. Quand on est dans ce cas-là, on doit assumer, alors je me dis que je dormirai plus tard.
À quel moment tu commences à faire des morceaux et à les enregistrer en studio ?
Ça a commencé à la création du studio de mon père (Babakam, manager et producteur de talent chez Webedia comme Inoxtag et Michou, ndlr) dans le 5ème arrondissement, il y a deux/trois ans. Je faisais beaucoup d’aller-retours là-bas. Avant j’allais déjà dans les studios mais là c’était celui de mon père donc je pouvais y aller plus souvent et je pouvais accompagner les artistes. J’assistais à leur manière de travailler, j’absorbais, j’absorbais, j’absorbais, jusqu’au jour où je me suis dit : “Pourquoi pas moi ?”. Je ne les accompagnais pas du tout dans une optique de faire de la musique plus tard. J’ai ce côté curieux, j’adore le monde de la musique, mais en faire n’était pas un rêve, mais avec le temps cette envie m’est venue au final.
Dans la Feat-tape, tu vas dans tous les horizons musicaux, quels sont pour toi les artistes qui t’ont influencé ?
Dans un ordre chronologique, il y a eu Mickaël Jackson, Usher, et les Black Eyed Peas. Après je suis tombé dans le rap avec Fianso par exemple, mais ce n’est pas le seul, je me suis intéressé à tout le monde, même aux plus anciens. Mon père m’a donné une culture musicale très large : il m’a fait vraiment écouter de tout. Il m’a donné cette chance de découvrir vraiment tout un univers artistique.
Dans cette première tape, tu vas dans différents univers, quels sont les styles que tu préfères appréhender ?
Cette multiplicité musicale c’était pour montrer aux gens toute l’étendue de ma palette. Je ne souhaite pas prouver quelque chose, mais montrer que je sais faire plein de choses. Pour être transparent aussi, je me cherche encore. Là je prépare déjà la suite, et on retrouve encore cette identité où je passe du tout au tout. Je me cherche encore et c’est normal car je suis jeune (17 ans, ndlr). Les gens de mon âge se cherchent, chacun à sa manière. Mais je ne veux pas me prendre la tête, je kiffe tout faire et chaque heure de studio est un vrai plaisir. Si je sens qu’il y a un mauvais mood, on arrête et on change de prod, sauf dans le cas où il y a des échéances et des délais, mais sinon ça ne sert à rien de forcer, mieux vaut partir sur autre chose.
Réaliser une feat-tape peut être très complexe notamment dans l’enregistrement des morceaux, comment ça s’est passé ?
Chaque morceau a son univers et rien n’a été fait à distance. Après, il y a eu des arrangements où on se donne des modifications au téléphone, mais tout a été fait au studio. Par exemple, Fianso était à un moment à Nice, on est descendu pour le faire ensemble afin d’éviter de le faire à distance. Je trouve qu’un morceau fait à distance peut vraiment se ressentir dans sa version finale, il peut manquer d’alchimie. Chaque artiste du projet avait son univers, et chaque moment de studio était incroyable. Il y en a pas un avec qui j’ai préféré bosser. Par contre en termes d’apprentissage et d’expérience, j’ai énormément appris avec Fianso et L’Algérino.
D’ailleurs, vrai contre-pied avec L’Algérino…
Tout le monde s’attendait à un banger, et finalement c’est du boom-bap. Je pense que la première fois que le public a écouté le morceau, il a compris que les artistes qui sont sur le projet n’ont pas été appelés parce que le contact était facile via mon père. Ce n’est pas le cas, il y a une histoire derrière chaque titre. Le projet vient indirectement de L’Algérino. J’étais au studio avec lui pendant son séminaire, juste pour l’accompagner pour voir comment il bosse. À un moment, il me demande d’entrer en cabine pour faire une topline car il m’avait déjà entendu rapper. Je fais la topline, il kiffe de fou et il a posé dessus. Il m’avait même proposé de poser sur le morceau, mais on a préféré attendre le bon moment pour faire cette collaboration. Dès qu’on a eu ce “GO” de L’Algérino, on s’est dit qu’on allait faire cette idée de Feat-Tape.
Quand tu dis, que le contact pouvait être vu comme facile, tu as eu des reproches ou des critiques faciles en mode « c’est facile t’es le fils de… » ?
J’en reçois tous les jours, mais ça ne m’atteint pas. Si mon père ne m’avait pas donné cette force-là ou les moyens de faire ça, les gens m’auraient aussi reproché de ne pas faire appel à lui. C’est mieux de ne pas écouter et d’avancer, car quoi qu’on dise et quoi qu’on fasse, les gens trouveront toujours le moyen de parler, c’est comme ça. Sans mon père, je n’en serai pas-là c’est sûr, mais si je n’avais pas les épaules ou le talent, il n’aurait jamais misé sur moi. Mon père n’a pas de temps à perdre, il a une image et il n’aurait jamais pris le risque d’échouer, et encore moins avec son fils. Il croit en moi, c’est le plus important. C’est une situation particulière qui peut être une sacrée pression, mais aujourd’hui je passe au-dessus.
Et même, faire une feat-tape, c’est d’autant plus un argument de force, surtout quand des beaux noms sont dessus, pour dire que beaucoup croient en toi et aiment tes propositions musicales ?
Oui totalement, c’est un vrai argument de force. Je dis « on » car je ne suis pas tout seul, mais on a fait ce choix-là justement pour m’installer différemment. Normalement un artiste va faire un premier projet, sans featuring, pour se présenter. Moi je voulais qu’on remarque mon identité musicale, ma voix, ma technique et ma capacité à m’adapter dans différents styles pour qu’on se dise que j’ai du potentiel. Après ils apprendront à mieux me connaître avec des interviews et sur les prochains projets.
Dans ce projet, il y a le morceau All Eyes On Me avec RAF, on a cette ambiance très Los Angeles, West Coast, un peu génération GTA dans le fond ?
(rires) Je suis de cette génération qui a grandi avec GTA. Après les références ne sont pas spécialement par rapport à GTA, mais je suis de cette génération clairement (rires). Si on est parti dans ce délire Los Angeles, c’est parce que RAF vient de là-bas entre autres. Même si pour son cas, il parle très bien français, travailler avec l’international c’est la meilleure des choses qui puissent exister. Travailler avec l’international, c’est une autre façon de travailler et j’adore ça, c’est de la culture. C’est des univers différents, j’apprends beaucoup de choses comme lorsque je fais un morceau avec la chanteuse espagnole, Sara Sofia.
Je suis une personne très curieuse, je commence à apprendre aussi petit à petit à composer. Mon ingé-son, Kidd Lloyz, c’est aussi mon beatmaker, je travaille principalement avec lui, et à force de faire des séances studio, je découvre et j’apprends. Je suis toujours dans cette dynamique d’apprendre de nouvelles choses et de tester. Là par exemple, j’ai envie d’apprendre à faire du piano et de la guitare pour contribuer aux productions.
16 featurings sur ce projet, quel invité aurais-tu aimé sur le projet ou avec qui tu aimerais collaborer ?
À l’international, je te dirai forcément 50 Cent et MC Kevinho. Ce n’est pas des rêves, mais c’est des artistes avec lesquels j’ai grandi. MC Kevinho n’est pas mondialement connu, il l’est surtout au Brésil. Je l’ai découvert dans une série Netflix, et je me verrais bien collaborer avec lui. Il y a même des artistes que je découvre par le biais de TikTok avec qui j’aimerais bien faire quelque chose. Ce n’est pas forcément des gros artistes avec des gros noms, mais des artistes qui me parlent avec qui j’aimerais passer du temps en studio.
Quels sont tes objectifs sur le long terme ?
J’aimerais avoir sorti plusieurs albums, que les gens s’identifient et trouvent le bonheur dans la musique que je produis. Après comme tout le monde, j’aimerais aussi avoir des certifications (rires). Et puis peut-être basculer un jour dans le 7ème art, c’est un milieu qui me passionne et m’intéresse beaucoup. J’aime apprendre et je suis très curieux de l’art en général. Du côté de mon père c’est la musique mais du côté de ma mère c’est le dessin, j’apprends facilement alors j’aime plus facilement les univers que j’explore, et je n’ai pas fini mes explorations.